ZZZZ...Je pense..(ça m'arrive) ZZZZZ..





"J'aime bien le paradis pour son climat, mais je préfère l'enfer pour ses fréquentations -Oscar Wilde--"


Mais à la réflexion, cette citation pourrait être archivée dans la rubrique "Insousciante jeunesse"...


Comme un défi, j'aimais bien reproduire cette citation sur le tableau noir du Café des Cinéastes ... à coté de la place de Clichy...
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mardi 8 juillet 2014

TEMOIGNAGE ....

Témoignage de Hanaé lors de la rencontre à l'Hôpital Bichat....

J’aimerais pouvoir dire simplement « Pierre va me manquer » comme si c’était nouveau…mais il me manque déjà depuis trop longtemps. Je sais que je suis loin d’être la seule dans ce cas, que tous ceux qui ont croisé sa route ont partagé ce sentiment de révolte face à sa maladie, et partagent aujourd’hui ce sentiment que le monde a perdu quelqu’un d’infiniment précieux, d’une bonté rare.
 
 
Ses collègues de Bichat ont connu sa générosité, sa gentillesse légendaire, ils ont peut-être moins connu le Pierrot que j’ai rencontré en prépa,
terriblement drôle, espiègle, faisant des blagues parfois très cyniques mais qu’il disait dans un petit rire étouffé, comme s’il était lui-même surpris de l’énormité qu’il venait de sortir, comme pour dire « regarde c’est horrible mais hé ça ne vient pas de moi, c’est le monde qui est comme ça, alors autant le dénoncer et en rire ».
 
Un faux cynique en fait, sans aucune méchanceté, avec un regard
2002 soirée intégration hypokhâgne
 toujours tendre sur le monde et les autres.

Je crois que c’était ça son ingrédient secret,
ce qui le rendait si particulier, si irrémédiablement aimable : il allait à la rencontre du mondeavec sa petite démarche sautillante, mine de rien, prêt à l’embrasser tout entier sans aucune naïveté mais avec malgré tout la plus grande bienveillance.

Lorsqu’il est retombé malade j’ai d’abord tenté d’étouffer mes souvenirs, trop forts, trop doux, des instants trop parfaits, puis à force d’essayer d’accepter son silence forcé, j’ai presque fini par oublier son rire, sa démarche, ses intonations. Aujourd’hui je laisse revenir tous ces moments, tous ses accents de joie ou de colère, je me nourris du souvenir de son honnêteté totale avec les autres et avec lui-même, de sa manière d’être là, entièrement, et de nous ancrer dans le présent avec lui à chaque instant.

Il me manque depuis des années, à chaque café, à chaque soirée, à chaque concert, à chaque plan galère de déménagement de copains, à chaque jeu de mots à la noix, à chaque fois que je vois quelqu’un sortir une machine à rouler, à chaque fois que j’entends parler de quelqu’un qui a oublié sa valise dans le train, à chaque fois que je croise un mec qui s’est laissé convaincre par sa coiffeuse que le noir bleuté ça lui irait trop bien…

Maintenant qu’il a cessé de souffrir, et même si je trouve parfois le monde insupportablement hypocrite de faire semblant comme ça de tourner encore rond alors qu’il n’est plus là, je continue à sortir, à retrouver nos amis, à voir des petits groupes de reggae qui mettent une ambiance de folie, et je l’imagine quelque part dans la foule, pas loin, à mes côtés, chantant, dansant, s’amusant à nouveau, parce que c’est ce qu’il aimait et parce que je ne sais pas comment lui dire mieux « Tu es toujours là, avec nous, viens, tu seras mon passager clandestin et je t’emmènerai partout vivre la vie dont tu as été privé ».

Hanaé - 3 juillet 2014
Rencontre à Bichat
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